30 ans de Maison Moderne, évolution du paysage média, arrivée de Forbes, réforme de Plurimédia… Ce qui a changé et ce qui changera selon Mike Koedinger

La semaine est chargée pour le fondateur et CEO de Maison Moderne (éditeur de Paperjam et Delano), qui vient de célébrer coup sur coup les 30 ans de l’entreprise en public puis en interne. Mais Mike Koedinger a quand même trouvé le temps de répondre, tard le soir, à notre interview « changement ». Et l’heure tardive a certainement joué en faveur d’un franc-parler, pour des réponses sans filtre.

En 30 ans, qu’est-ce qui a le plus changé dans le secteur des médias?

Le lecteur et la technologie. Et avec cela, la façon de consommer les médias.

En 30 ans, qu’est-ce qui a le plus changé dans les médias au Luxembourg?

– RTL s’est transformée d’une émission TV hebdomadaire à dormir debout, «Hei Elei Kuck Elei», pour les nostalgiques, en une véritable chaîne aux standards européens.

– Le Wort a perdu son lectorat et son influence, surtout dans les milieux économiques. Son éditeur est passé d’un millier de collaborateurs à environ 230. C’est la fin d’un modèle d’une autre époque. Le rachat par le groupe belge Mediahuis en 2020 est donc une bonne opportunité.

– Les radios se sont libéralisées pour échapper au monopole d’RTL, avant qu’RTL ne finisse par racheter progressivement les fréquences à succès (Eldoradio, Radio L’essentiel).

En 30 ans, RTL s’est transformée d’une émission TV hebdomadaire à dormir debout en une véritable chaîne aux standards européens.

– Ce qui est aujourd’hui le deuxième quotidien en termes d’audience, L’essentiel, n’existait pas il y a trente ans. Il a été lancé en 2007.

– Le premier média en termes d’audience n’aurait pas pu exister il y a trente ans. Impossible sans internet. C’est RTL.lu.

– Un jeune éditeur cherchant à réaliser son rêve lance une entreprise et, trente ans plus tard, est devenu le fondateur de Maison Moderne.

En 30 ans, qu’est-ce qui a le plus changé chez Maison Moderne?

Tout a changé, sauf la passion d’éditer, d’informer et de rassembler une communauté.

En 30 ans, qu’est-ce qui a le plus changé en vous?

Le sens de la responsabilité.

Avec le recul, si vous pouviez changer une décision prise ces 30 dernières années, vous changeriez quoi?

Je n’aurais jamais dû arrêter notre spin-off Spider.lu SA. Un moteur de recherche lancé en 1999, juste un an après Google, à l’époque où le monde utilisait encore des annuaires de sites web à la Yahoo ! Des bons algorithmes made in Luxembourg, avant leur temps.

Je n’aurais jamais dû arrêter notre spin-off Spider.lu

Aujourd’hui, si vous deviez changer de métier, vous feriez quoi?

Journaliste ou photographe, mais indépendant et libre de toute obligation.

Si on vous proposait d’échanger Maison Moderne contre une autre entreprise, vous choisiriez quoi?

Au niveau mondial, j’hésiterais entre le Financial Times et le New York Times. Au niveau européen, je pense au groupe Bonnier. En Allemagne, à Brand Eins et en Belgique, à Mediafin, l’éditeur de L’Echo. Au Luxembourg, non merci, je préfère garder Maison Moderne.

Si on vous demandait de repenser l’étude Plurimedia, vous changeriez quoi?

Je l’adapterais pour qu’elle corresponde à la réalité du marché luxembourgeois et aux besoins réels des annonceurs, des agences et des médias, en intégrant les frontaliers dans l’échantillon et en proposant le questionnaire également en anglais.

L’arrivée de Forbes au Luxembourg, ça va changer quoi?

Ça va surtout rendre heureuses les mamans d’entrepreneurs luxembourgeois qui verront leur fils dans Forbes. Plus sérieusement, Forbes est une belle marque internationale, disponible sous franchise. Parmi les multiples éditions de Forbes, c’est l’espagnole qui me séduit le plus. C’est Spain Media qui détient la franchise et qui se permet beaucoup de libertés par rapport au cahier des charges. Forbes Belgique sera édité par Ventures Media. J’ai rencontré Florian de Wasseige, le fils du fondateur de Ventures Media, une société spécialisée dans la commercialisation de marques internationales sous franchise. Ils éditent notamment Elle ou Ideat en Belgique.

Je suis certain que la marque Forbes attirera des annonceurs, du moins au début.

Je suis certain que la marque attirera des annonceurs, du moins au début. Mais cela restera un vrai défi d’attirer les lecteurs car le magazine combinera des contenus internationaux, belges et luxembourgeois. Des revenus, il faudra déduire les royalties pour la franchise, puis la marge pour l’éditeur belge, et il ne restera probablement pas grand-chose pour les pigistes luxembourgeois qui seront face au challenge de produire régulièrement un contenu attractif pour les lecteurs du Luxembourg.

Pour servir les plus de 100.000 lecteurs de Paperjam, nous avons besoin d’une rédaction d’une vingtaine de journalistes. C’est coûteux, mais l’IA ne va pas remplacer les journalistes. Elle augmentera leur productivité et enrichira leurs contributions.

À quel grand changement doit-on s’attendre chez Maison Moderne en 2024 ?

Le principal changement aura lieu en septembre 2024. Nous l’annoncerons dans le numéro du 25 septembre qui sera à nouveau tiré à 300.000 exemplaires pour être distribué dans toutes les boîtes aux lettres au Luxembourg, en plus de notre réseau habituel d’entreprises, de bureaux de presse et de mailing aux abonnés et aux membres. Ce numéro marquera aussi le début de la saison durant laquelle Paperjam célébrera ses 25 ans.

Ce sera d’ailleurs un numéro spécial dédié aux Next Leaders et on dressera les portraits de 100 personnes inspirantes de moins de 40 ans. C’est un contexte éditorial très attrayant qui permet aux marques luxembourgeoises de s’associer à l’opération et de toucher toute la population en plus des décideurs économiques.

Mais l’année 2024 sera riche du début à la fin. Paperjam Industrie 50 (janvier), Paperjam Female Founders (février), Paperjam Unusual Suspects (mars), un numéro dédié aux personnes dont on n’a pas, ou pas assez, parlé lors de nos premières vingt-quatre années. Des soirées de lancement accompagneront ces parutions, parfois au Den Atelier ou lors des conférences 10×6. On clôturera l’année en beauté avec l’organisation de la 10e édition du Paperjam Top 100 – le classement des décideurs économiques les plus influents au Luxembourg dans le cadre d’un dîner assis à la Rockhal et qui réunira les lauréats du concours depuis son lancement en 2006.

Côté régie, rappelez-vous qu’elle est passée sous le leadership de Pierre-Alexis Quirin. Côté agence, on recrute encore car nous souhaitons la réinventer.

Le Business Club se porte très bien. Michel Grevesse développe l’offre des partenariats pour permettre aux marques de briller lors de nos nombreux événements, et il vise les 2.000 entreprises membres pour la fin de l’année 2024.

Dès janvier, nous reprendrons la commercialisation de Bingo.lu, en février nous lancerons la solution de marketing digital appuyée par l’IA, Chloe, Nexus 2050 aura bien lieu fin juin à Luxembourg. Et nous continuerons avec notre programme Media4Equity tout au long de l’année et nous sommes ouverts aux propositions d’investissements lorsque les entreprises peuvent gagner en valeur grâce à notre écosystème, et notre écosystème grâce à elles.

Nous sommes ouverts aux propositions d’investissements lorsque les entreprises peuvent gagner en valeur grâce à notre écosystème, et notre écosystème grâce à elles.

Mais finalement, le plus grand changement pour 2024 pourrait ne résider ni dans un produit, ni dans un service, mais plutôt dans une évolution de la culture de l’entreprise, incarnée par nos collaborateurs à travers leur comportement quotidien.

L’ensemble de la direction de Maison Moderne a suivi une Masterclass « Scaling Up » sur douze mois, ce qui nous a notamment amenés à reformuler notre raison d’être et nos valeurs. Prêts à les découvrir en avant-première? Maison Moderne, Shaping the future of a progressive Luxembourg. Chez Maison Moderne, nous sommes indépendants, exigeants, pragmatiques, engagés et tolérants.

La raison d’être de Maison Moderne: Shaping the future of a progressive Luxembourg.

Si vous êtes arrivé jusqu’ici alors partagez l’article, je suis sûr qu’on peut faire mieux que l’année passée! (l’article au sujet du retour de Mike Koedinger au poste de CEO était le 2ème article le plus lu de l’année sur adada en 2022, ndlr).